Un gentil zombie mauvais génie

De Paul Gonze
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En primaire, les camarades de classe d'Unalala Bwana l’avaient surnommé « Le Zombie ». Sans doute parce qu'il leur paraissait plus au moins endormi, (déjà) dans la lune, noire ou blanche. Ce sobriquet qui se voulait péjoratif, au lieu de le blesser, lui plaisait. Il revendiquait ce statut de déconnecté, se targuant, comme le comte de Lautréamont, de ne pas être de ce monde, d’avoir "un sourire qui ne ressemblait pas aux sourires des humains", de sourire avec les dents, derrière les lèvres.

A la fin de ses primaires, il l’avait adopté comme patronyme. Il avait même "customisé" sa signature qu'il taquait au bas de ses dessins et textes et qu'il avait même gravé à l’intérieur de mon cartable.

Cette signature devait faire référence – inconsciente – au sigle que Zorro marquait, de la pointe de son épée, au front des malfaiteurs qu’il avait démasqués. Pour lui, elle rappelait surtout l’immense logo que Zorglub, le concurrent tordu du professeur de Champignac, avait peinturluré à la surface de la lune… à l’envers.

Ce qui se révèle aujourd'hui, ce qui est frappant, un demi-siècle plus tard, c’est que le sigle de TOUT n’est pas sans accointance avec le Z d'Unalala Bwana, le gentil zombie marqué par une incurable propension à fuir la réalité et à se réfugier dans le monde du rêve, à décoller de la terre pour vagabonder dans la lune.

Ceci explique peut-être aussi le fait que, malgré une activité onirique débordante, voire fébrile, malgré quelques projets spectaculaires, les élucubrations de l'équipe ne sont reconnues comme géniales que par les co-équipiers et quelques groupies aux opinions partisanes. Et qu'Unalala ne se prends plus pour un zombie mais pour un génie raté, fèlé. Un mauvais génie!